Pieds dans le PAF - association d'éducation aux médias

Fake News : le bilan 2019


Qui dit nouvelle année dit bilan de l’année passée, et si on se penche sur l’année 2019, on peut se dire que celle-ci était vraiment l’année du fake ! De la fake news, il y en a eu en pagaille, pour tous les goûts, et de toutes parts.
Revenons donc sur ces 12 mois ou chaque événement a eu son traitement en fake news… construisant comme une réalité parallèle… Vous avez dit post-vérité ?

Fake news d’en haut

Première leçon à tirer de l’année écoulée, la fake news peut arriver de n’importe où, y compris du gouvernement. Le

premier mai, le Ministre de l’Intérieur Christophe Castaner postait ce tweet : « Ici, à la Pitié-Salpêtrière, on a attaqué un hôpital. On a agressé son personnel soignant. Et on a blessé un policier mobilisé pour le protéger. Indéfectible soutien à nos forces de l’ordre : elles sont la fierté de la République. » Ce « mensonge d ‘état » pour certains, contient en tout cas la recette parfaite de la fake news : elle est agrémentée de photos hyper-symboliques et est écrite dans un style télégraphique, façon « reporter de guerre », qui ne laisse pas de place pour la remise en question. Avec ce premier exemple, on voit que le gouvernement malgré son désir d’éradiquer les infox (loi « anti-infox de 2018), n’a pas toujours balayé devant sa porte…

Pas de fumée sans feu

Presque un mois plus tôt, c’était l’incendie de Notre-Dame et l’embrasement des réseaux sociaux. Les théories du complot se sont enchaînées, faisant tour à tour des gilets jaunes, du gouvernement et des djihadistes les responsables de l’incendie. Malgré un réel travail de débunkage de l’AFP notamment, la fake news s’est propagée, comme toujours, plus vite que la vérité, y compris par des élus. Alors me direz-vous ? Alors Claude Sinké, octogénaire de Saint-Martin-de-Seignanx,

décide de mettre le feu à la mosquée de Bayonne et blesse grièvement deux personnes. Déclarent vouloir « venger la destruction de la cathédrale de Paris », Claude Sinké représente à la fois, la victime et le relais et le bourreau de l’infox.

 

Du feu, il y en a eu beaucoup en 2019. Le 26 septembre, alors que l’information principale est dédiée aux obsèques de Jacques Chirac, à Rouen l’usine chimique Lubrizol prend feu. Si l’info est majoritairement mise au second plan par les médias traditionnels, certain tentent de se positionner entre les paroles expertes et citoyennes : c’est le cas malheureux de 20 minutes qui titre : « Un nuage de fumée un peu toxique mais pas trop ». Il n’en faut pas plus pour qu’une vague de défiance légitime déferle sur la toile et ouvre la voie à une série de fake news alarmistes sur les conséquences de l’incendie.

 

Autocritique ?

Sans trêve, les fausses informations ont continué toute l’année. Il y a eu évidement l’affaire Xavier Dupont de Ligonnès, et sa démonstration de ce que la course au scoop amalgame la qualité de l’information, et sa vérification.
Au regard de ces différents cas, on peut tirer la conclusion suivante : la désinformation apparaît là ou l’information est mal traitée : trop rapidement reprise, sans recul, avec maladresse, sans remise en question de la parole officielle. Les journalistes et les politiques doivent impérativement faire un travail d’autocritique : la défiance env ers leurs deux mondes ne vient pas de nulle part.  Or, les deux ont du mal à reconnaître leurs torts, et lorsqu’il s’agit de fake news, renvoient beaucoup la responsabilité sur les autres…

Aller plus loin dans la lutte?

Vendredi 13 Décembre se tenait le « comité d’experts sur la désinformation en ligne » organisé par le CSA qui est censé faire appliquer la loi « anti infox » de 2018. Lueur d’espoir ? Outre le fait de trouver parmi les experts des dirigeants d’agences publicitaire et des patrons d’entreprise commerciales (groupe Michelin, Havas), l’objectif du CSA se lim

John William Waterhouse – Les Danaïdes – 1903

ite à une série de recommandation et à des pratiques qui sont selon l’opposition des « menaces d’atteinte à la liberté de la presse ».

La lutte contre les fake news est un tonneau des Danaïdes, si l’on se borne à les interdire : elles ressurgiront toujours d’ailleurs. Moins mise en avant dans la loi anti-infox 2018, l’article 17  stipule une démarche qui nous semble la plus viable et la plus porteuse de sens et d’espoir : « La formation dispensée à tous les élèves des collèges comprend obligatoirement une initiation économique et sociale et une initiation technologique ainsi qu’une éducation aux médias et à l’information qui comprend une formation à l’analyse critique de l’information disponible. »

Allez, on y croit pour 2020.